Le soleil sur ta nuque, je m’approche, le capturer, échec. L’ombre sur ta hanche, roder, bondir, sans résultat. Un tigre dans le salon, hey.
Sur la plage, une cloche massive, à demie enfouie. Les restes du presbytère. Nos vélos.
Collées sous la douche, tiède, les filles complotent. Le son de l’eau trouble astucieusement les micros cachés. Les orteils se touchent. Si.
Igor sautille dans le salon. Ses pieds ensanglantés racontent son histoire. Il sautille. Ses mains, ses deux témoins. Et ses yeux, éteints.
Le jour de la fin du monde, l’aube était arrivée calmement, comme à son habitude. Tout était normal, partout. Puis, plus rien.
Tendre les jambes, les bras, s’étirer au maximum, ronronner brièvement. Par la fenêtre, apercevoir l’aube sur les ruines. Sauter du lit, nu.
Et toujours, le drapeau noir.
Arriver en haut de la côte, cracher sérieusement nos poumons. Voir nos poursuivants qui se rapprochent. Pousser vers eux de gros cailloux.
J’attends ton retour, dans ma tour purpurine, mon regard vers la plaine, nulle trace de ton sublime engin, seulement le soleil qui poudroie.
Après la première, et brêve, réunion, la cellule s’est accordé sur un point, le drapeau : il sera noir. Noir ça va avec tout. Mina se marre.
Le jour de la fin de tout, la pluie n’était pas plus abondante, humide ou sale, que la veille. Les enfants riaient. Puis, la grande chaleur.
Depuis les collines, on pouvait apercevoir la mer.
Les 12 sous-marins nucléaires des Unités Libres Fanfarons du Larzac (ULFL) se cachaient, intelligemment, au fond de la mer. Igor s’ennuyait.
Je ne doute pas que tu sois quelqu’un de raisonnable. Je ne doute pas de tes bonnes intentions. Je ne doute pas de ta réalité. Presque pas.
Et nos élites, dangereusement sobres, de décider, en grandes pompes, sur un joli papier doré, et sonnent les trompettes, de ne rien décider.
Mina, lasse, assise dans la douche exiguë, se laisse aller à la nostalgie. L’eau, pas très chaude, déborde tranquillement. Dehors, il neige.
Avant la guerre, l’utopie, le chaos, l’entropie et tout le gros bordel d’après, Mina était libraire, Igor, épicier bio et Carver, une fille.
La tournée se termine, Minnesota, plutôt un succès. Le groupe est dans la salle de bain. Allongé sur le lit, je compte le fric. Détonation.
Juste avant l’aube, les sirènes. On commençait à s’y habituer. La bonne heure pour nourrir les félins, aveugles. Puis, un thé, vert et fumé.
La réserve : plus de piles, plus de munitions, plus d’eau, juste des boites de Lego, un gros stock, et sept mimes muets. On ferme la porte.
Quelques minutes avant de débuter ce nouveau projet, je me posais foule de questions métaphysiques. Dans la salle de classe : grand silence.
Le mystérieux salon jaune du dirigeable rebelle : Loulou et Mina, victorieuses, se partagent les restes de l’utopie bourguignonne. Au poker.
Sous la terre, sous la dalle de béton, sol humide, odeur champignonnière, vibration sourde, les filles frissonnent, se blottissent. Suspens.
L’utopie anarchiste bordelaise se termine brusquement, un mardi. Quelques explosions, une épidémie soudaine, l’avènement du dictateur ivre.
On se retrouvait dans le hall pour comparer nos expériences. Puis, après le tirage au sort, on remontait dans nos chambres. Changer de sexe.
Mina avait trouvé un oud en bon état dans les ruines de Strasbourg. Ses tentatives pour l’accorder correctement ne donnait pas grand chose.
Le canal gelé servait de terrain de chasse à une bande de gamins kantiens. Gare aux chats et aux souris de passage. Les chiens, ça passait.
Mardi matin, l’épicerie, on arrange les cagettes dans l’espace utilisable. Les premiers clients arrivent rapidement, les navets, ça marche.
Spoiler : à la fin on va tous mourir.
Sur la table : une boite, noire. Dans la boite : cinq millions de nanomachines plutôt agressives. A la porte, les miliciens flous. J’hésite.
Mina, Carver et Igor, au sex-shop, achètent absolument n’importe quoi. C’est désolant mais aussi plutôt marrant. La vendeuse, hilare, nue.
Sur la plage couverte d’algues mutantes mangeuses de chair, un groupe de mariachis, terrorisé, se prépare pour la grande parade du solstice.
Pour quitter le bunker : pressez le bouton rouge, énorme, puis attendez la fin des explosions, puis celle de l’hiver nucléaire, puis sortez.
La belle grosse dame apprenait à Carver à être un peu plus courageux face aux infiltrés martiens. Carver, timidement, lui touche le visage.
Igor, en mini short, cuir naturel, se décide enfin. En ville, on ne parle que de ça. Nos troupes, enfin, au nord, hilares, se convertissent.
On se servait d’une simple TR-808 pour déminer la plage. Et de puissants amplificateurs. Il fallait aussi fermer les yeux et y croire, fort.
Sous le camion, garé devant la gare en ruine, je fixe le mécanisme explosif, le détonateur à distance, les tracts. Mes mains tremblent trop.
Mina me donnait ses vieilles robes, les longues, pas pratiques pour courir. Ça me dépannait totalement pendant la, courte, saison des bals.
Mina, cheveux rasés, hautes chaussures militaires, jumpsuit noire, assure le spectacle. Ses bras moulinent, hypnotiques. Igor, nu, sanglote.
Sur la scène, violemment éprouvée par les bombardements, Carver et l’homme à la tête de chat s’agitent, épilepsie. Épiphanie dans le public.
Cette nuit là, sous la fragile protection de la tente anti-radiation, dans la grande forêt de Sherwood, les joyeux compagnons se préparent.
Depuis deux heures Mina démonte un vieil obus. On essaie de l’emmener danser, au village, mais impossible de la décontenancer. Elle assure.
Nos trois compères habituels et l’homme à la tête de chat (sérieusement c’est quoi comme nom ça) décident d’envahir le sud du coin cuisine.
Pour tromper l’ennui, inévitable, nous avions décidé de ne plus nous réfugier dans les abris pendant les bombardements. Ça marche trop bien.
Dans le wagon : des roses, un canon. Mina préfère visiblement les canons. Par la fenêtre, ça canarde sévère. Igor compte les roses, ivre.
Nos petits jeux, innocents, ne provoquaient que morts et désolation. Mon nouveau vernis, « tumeur maligne », faisait sensation dans la région.
On déverrouille la lourde porte métallique. L’entrée est solennelle, personne ne moufte. On se débarrasse des téléphones. Sublime légèreté.
L’homme à la tête de chat, au piano, aimait nous interpréter d’antiques chansons pop d’avant la guerre. Carver l’accompagnait au triangle.
La cave, encore, sous l’usine au bord du canal, le béton partout, le groupe électrogène dans un coin, les punks qui s’agitent, nous enlacés.