Mina, cheveux rasés, hautes chaussures militaires, jumpsuit noire, assure le spectacle. Ses bras moulinent, hypnotiques. Igor, nu, sanglote.
Mina utilisait un logiciel militaire chinois pour produire d’élégantes aquarelles de la citadelle. Carver préférait les pinceaux humides.
Mina invente cent recettes modernes afin de se préparer une apocalypse implacablement ludique. Dans le bunker voisin, on compte les slips.
Quelques minutes avant de débuter ce nouveau projet, je me posais foule de questions métaphysiques. Dans la salle de classe : grand silence.
Sur la plage couverte d’algues mutantes mangeuses de chair, un groupe de mariachis, terrorisé, se prépare pour la grande parade du solstice.
Dans une boîte de fer, sous le plancher, une multitude de fiches cartonnées, de courts messages. Sur la boîte : « Fragments d’apocalypses ».
Après la première, et brêve, réunion, la cellule s’est accordé sur un point, le drapeau : il sera noir. Noir ça va avec tout. Mina se marre.
Presque plus rien à manger, de l’eau à volonté, neuf cent gélules d’extasy. Nos trois compères ne s’imaginaient pas survivre bien longtemps.
Je ne doute pas que tu sois quelqu’un de raisonnable. Je ne doute pas de tes bonnes intentions. Je ne doute pas de ta réalité. Presque pas.
La cave, encore, sous l’usine au bord du canal, le béton partout, le groupe électrogène dans un coin, les punks qui s’agitent, nous enlacés.
La nuit. Le feu.
Mina, Igor et Carver, dans le salon, observent le géant, ivre, qui repose sur le canapé, défoncé. À la radio, Electrelane. Ici, il est midi.
On déverrouille la lourde porte métallique. L’entrée est solennelle, personne ne moufte. On se débarrasse des téléphones. Sublime légèreté.
Nos trois compères habituels et l’homme à la tête de chat (sérieusement c’est quoi comme nom ça) décident d’envahir le sud du coin cuisine.
Depuis la forteresse ensevelie, Mina surveillait les miliciens ivres depuis deux jours déjà. L’aube, le village désert, la neige, un renard.
Les 12 sous-marins nucléaires des Unités Libres Fanfarons du Larzac (ULFL) se cachaient, intelligemment, au fond de la mer. Igor s’ennuyait.
Deuil. Mina accélère. Le véhicule racé tangue dangereusement. Igor termine la vodka. Carver canarde les poursuivants, ivre. Enterrement ok.
Tendre les jambes, les bras, s’étirer au maximum, ronronner brièvement. Par la fenêtre, apercevoir l’aube sur les ruines. Sauter du lit, nu.
Dans les ruines, deux petites filles jouent à la guerre. Mina se fige, mimant une blessure par balle. Carver l’embrasse pour la soigner. Si.
Mardi. On émerge de l’abri de fortune et on se rassemble dans la prairie luminescente. Cueillette et danses variées sont au programme. Nus.
Depuis deux heures Mina démonte un vieil obus. On essaie de l’emmener danser, au village, mais impossible de la décontenancer. Elle assure.
Igor sautille dans le salon. Ses pieds ensanglantés racontent son histoire. Il sautille. Ses mains, ses deux témoins. Et ses yeux, éteints.
Igor, en mini short, cuir naturel, se décide enfin. En ville, on ne parle que de ça. Nos troupes, enfin, au nord, hilares, se convertissent.
S’égarer dans une forêt, la nuit. Vraiment se perdre. Allumer une balise GPS. La fixer au dos d’un tigre non castré. S’éloigner super vite.
Notre minuscule stand de reproduction d’objets. La petite imprimante surchauffe. La refroidir à la Vodka. Extruder un petit dragon. Suspens.
Depuis les collines, on pouvait apercevoir la mer.
La citadelle était reliée à l’île par une mince bande de terre assujettie aux marées. On utilisait ensuite un vieux monte-charge effrayant.
La télé bloquée sur du télé-achat d’avant la Fin. Les miliciens passionnés s’imaginent profiter de ces biens, plutôt agréablement vendus.
Igor, Carver, enlacés. Sensation d’étouffer. Mina chantonne. La nature mutante est d’un rouge orangé. Nos amis découvrent 7 nouvelles fins.
La tête me tourne, je zieute alentour, hésite, la vallée ou le campement des hooligans mutants ? Les cyclopes font un excellent vin naturel.
En contrebas, dans les tranchées inondées, Igor et Carver construisent une étrange machine à vapeur. Miliciens, résistants, méditent, ivres.
Mina dévisage Igor, longuement, les mains dans les poches de sa combinaison de saut. Igor ouvre les écoutilles avant. Carver attrape le sel.
Funérailles : on enterre les armes, les munitions. On repeint aussi le bunker en jaune pâle. Sur la façade Est, Mina installe les explosifs.
Sous la terre, sous la dalle de béton, sol humide, odeur champignonnière, vibration sourde, les filles frissonnent, se blottissent. Suspens.
Deux longues secousses ce matin. Peu de chance que le monastère bascule dans la mer mais nous suivions pourtant les consignes napolitaines.
Et nos héros, fatigués, de contempler l’arrivée d’une aube timide, mais riche de promesses. Leurs doigts de s’effleurer. Fredonner, sourire.
Je colle l’oreille contre le mur, j’entends les gémissement, les murmures, les incantations. Puis viennent les démons, les sacrifices. Top !
Nous chassions autour du cratère verdoyant. Nous utilisions les arcs plutôt que les fusils, trop bruyants. Le gibier ne se montrait pas.
L’utopie anarchiste bordelaise se termine brusquement, un mardi. Quelques explosions, une épidémie soudaine, l’avènement du dictateur ivre.
Sur la terrasse ensoleillée, le temps semblait passer au ralenti. En contrebas les touristes, ivres, exigeaient de rencontrer le Pape, nus.
Pour tromper l’ennui, inévitable, nous avions décidé de ne plus nous réfugier dans les abris pendant les bombardements. Ça marche trop bien.
Mina me donnait ses vieilles robes, les longues, pas pratiques pour courir. Ça me dépannait totalement pendant la, courte, saison des bals.
Et nos voix, lointaines, de se mêler, enfin, malgré le vent, glacé. Et une mélodie, optimiste, de retentir dans les couloirs du bunker deux.
Pour passer le temps, les tireurs observaient les manigances des soldats arméniens dans la ville basse. Trafic d’organes et poésie lyrique.
Depuis quelques jours la Réalité s’obstinait à dépasser allègrement les limites de la fiction, coupant salement la chique du narrateur, nu.
On se servait d’une simple TR-808 pour déminer la plage. Et de puissants amplificateurs. Il fallait aussi fermer les yeux et y croire, fort.
Passer la nuit, blottis et nus, tous, sous la couette rapiécée. Conserver la chaleur, observer les ombres sur le mur. Échanger des sourires.
Mardi matin, l’épicerie, on arrange les cagettes dans l’espace utilisable. Les premiers clients arrivent rapidement, les navets, ça marche.
Mina, Carver et l’homme à la tête de chat, remontent le flux incessant des réfugiés irradiés, vers le centre, vers la lumière brûlante, nus.
La 7ème compagnie de paras zaïrois nous dépasse chevauchant de lourdes motos japonaises. Le petit dernier se penche : coeur avec les doigts.
On arrive au hameau par un sinueux sentier forestier. Les petites maisons sont entassées autour d’une, choquante, impie, cahute sur pilotis.
Un marteau à tête ronde, six clous et un hideux crucifix en laiton, le contenu de sa besace. Ses bottes militaires rouges, un son rassurant.
Igor, Mina, ludiques.
Cinq amis se disputent la place dans la nacelle. Fin de leur amitié, début de la fusillade. Carver profite du chaos, et de la montgolfière.
La piscine vide, moussue, où grouillent crapauds, moustiques. Igor, en scaphandre, plastique blanc, contemple les champignons, dans le ciel.
El próximo parabelo es bien el lago del demonio ?
L’Empire n’a jamais pris fin.
Et notre héros de terminer au poste après une réunion pacifiste, place de la République. Aventure navrante.
Le bunker. On se repasse encore les mêmes vieux serials : « Hips, dans ta gueule mon batarang, joker de mes deux tentacules, hips. »
Et notre héros, posté sur les hauteurs de Naples, de contempler les flammes, l’insurrection, les combats et les danses. On rase gratis. Oui.
Mina avait trouvé un oud en bon état dans les ruines de Strasbourg. Ses tentatives pour l’accorder correctement ne donnait pas grand chose.
L’architecture néo napolitaine de l’île que les miliciens danois occupaient ne cessait de troubler leurs amants siciliens. Ce soir : boxe.
Les ruines de la cité antique, 1000 soldats inertes rêvent de pluies glacées, de cavernes accueillantes. Mina aiguise sa baïonnette. Brume.
Dans le ciel, au dessus du canal fétide, de noirs cigares propagent la parole sacrée. Sur les rives, on s’essaie au jokari, nus, ivres.
Avant la cérémonie. Igor, serviable, bande les seins de Mina. Carver se taille la barbe avec précision. L’homme à la tête de chat ronronne.
Avant la guerre, l’utopie, le chaos, l’entropie et tout le gros bordel d’après, Mina était libraire, Igor, épicier bio et Carver, une fille.
La finale du cent mètres, les concurrents, étranges, se bousculent sur la ligne jaune. Le juge lève son pistolet. Frisson dans les tribunes.
Les mouettes ne provoquaient qu’un petit désagrément. Les tirs de mortiers étaient vraiment plus ennuyeux que le guano, les hurlements gras.
Cette nuit là, sous la fragile protection de la tente anti-radiation, dans la grande forêt de Sherwood, les joyeux compagnons se préparent.
Et toujours, le drapeau noir.
Dans les débris de la ville décapitée, une boite en acier nu. Au fond de la boîte, sous la sciure, l’espoir et un petit dragon en plastique.
Depuis la fenêtre de la chambre 12, à l’aide de mon monoculaire, je peux vous apercevoir en train de peindre sur la plage. L’orage arrive.
L’agence chargée de gérer les états de catastrophe naturelle décide de fermer provisoirement ses portes aux chefs d’entreprise en fuite. Si.
Le canal gelé servait de terrain de chasse à une bande de gamins kantiens. Gare aux chats et aux souris de passage. Les chiens, ça passait.
Sous le camion, garé devant la gare en ruine, je fixe le mécanisme explosif, le détonateur à distance, les tracts. Mes mains tremblent trop.
On se retrouvait dans le hall pour comparer nos expériences. Puis, après le tirage au sort, on remontait dans nos chambres. Changer de sexe.
Igor et Carver, bord de mer, polluée, métaux lourds et poissons morts. Coucher de soleil sur champignon atomique. S’enlacer pour oublier.
Le jour de la fin du monde, l’aube était arrivée calmement, comme à son habitude. Tout était normal, partout. Puis, plus rien.
Mina et Igor, Le bunker, cuisiner en chantant, chasser la nostalgie qui risque de tout submerger, monter la radio. t.co/E3rnWQOLav
Mina, lasse, assise dans la douche exiguë, se laisse aller à la nostalgie. L’eau, pas très chaude, déborde tranquillement. Dehors, il neige.
La tournée se termine, Minnesota, plutôt un succès. Le groupe est dans la salle de bain. Allongé sur le lit, je compte le fric. Détonation.
La vie, sur terre, est sur le point de disparaitre. Mais nos amis, goguenards, ne perdent pas le sens de l’humour. La lumière, trop vive.
Assis en cercle, dans l’herbe verte, nos yeux se croisent, nos orteils se frôlent, nos rires, nos cris. Le soleil sur nos peaux, si pâles.
Pour quitter le bunker : pressez le bouton rouge, énorme, puis attendez la fin des explosions, puis celle de l’hiver nucléaire, puis sortez.
Quelques jours après la guerre, les ruines de l’antique cité. La jungle partout. Les militaires, de tous pays, rient, baisent et pardonnent.
La pluie ne cesse de tomber depuis maintenant 39 jours et autant de nuits. Le capitaine se branche sur la chaîne météo : et demain, soleil !
Sur la table basse en bois sombre, la vieille boîte à biscuits, une centaine de petits sachets. La poudre ne va pas manquer ce soir. Mais.
Mina et les enfants soldats jouent dans les décombres du stade bombardé. Ils s’échangent des munitions, tirent au fusil, se font des câlins.
Dans sa citadelle, sur la falaise inexpugnable, le vieux fou prépare sa revanche. Dans la vallée cachée, on termine de difficiles vendanges.
Juste avant l’aube, les sirènes. On commençait à s’y habituer. La bonne heure pour nourrir les félins, aveugles. Puis, un thé, vert et fumé.
Dehors, les anciens dieux foulent la terre. Par la fenêtre, les hurlements des premiers sacrifiés. Et, Carver, Mina, ivres, nus, attendent.
Carver, Mina, commencent à organiser l’évacuation de la tentaculaire mégalopole. On recrute les chauffeurs de taxi, les mimes et les hamacs.
Nos petits jeux, innocents, ne provoquaient que morts et désolation. Mon nouveau vernis, « tumeur maligne », faisait sensation dans la région.
Igor fredonne le générique de Maraboud’ficelle, très doucement. Mina serre les poings. Carver verse deux larmes sur un bout d’enfance perdu.
Le bunker. Puis Berlin. On verra bien. Puis Paris. Septembre enfin.
Sur la plage, une cloche massive, à demie enfouie. Les restes du presbytère. Nos vélos.
Et dehors, dans le froid, nul espoir. Seulement la glace grise, la neige noire et les légions aveugles. Igor, à l’intérieur, calcule la fin.
Sur la route de Damas, Igor ramasse cent cailloux blancs. Emballés dans la soie. Pour offrir. Dans le ciel, noirs, les terribles léviathans.
Par une fenêtre étroite de l’ancien monastère devenu hôtel de luxe, Igor contemple l’île, l’adriatique, les ruines du fort détruit. Cloches.
Au début de l’été, nous mangions, en salade, de longues plantes rouges, « Artères de Jupiter », c’était raisonnablement infect, et triste.