On trouvait dans les collines de nombreuses villas à l’abandon, souvent vidées, nues. Elles nous procuraient de brefs, confortables refuges.
Sous la terre, sous la dalle de béton, sol humide, odeur champignonnière, vibration sourde, les filles frissonnent, se blottissent. Suspens.
La finale du cent mètres, les concurrents, étranges, se bousculent sur la ligne jaune. Le juge lève son pistolet. Frisson dans les tribunes.
Nous chassions autour du cratère verdoyant. Nous utilisions les arcs plutôt que les fusils, trop bruyants. Le gibier ne se montrait pas.
S’égarer dans une forêt, la nuit. Vraiment se perdre. Allumer une balise GPS. La fixer au dos d’un tigre non castré. S’éloigner super vite.
Dans sa citadelle, sur la falaise inexpugnable, le vieux fou prépare sa revanche. Dans la vallée cachée, on termine de difficiles vendanges.
L’Empire n’a jamais pris fin.
On se servait d’une simple TR-808 pour déminer la plage. Et de puissants amplificateurs. Il fallait aussi fermer les yeux et y croire, fort.
Le jour de la fin du monde, l’aube était arrivée calmement, comme à son habitude. Tout était normal, partout. Puis, plus rien.
Deux longues secousses ce matin. Peu de chance que le monastère bascule dans la mer mais nous suivions pourtant les consignes napolitaines.
Dans le wagon : des roses, un canon. Mina préfère visiblement les canons. Par la fenêtre, ça canarde sévère. Igor compte les roses, ivre.
Dans une boîte de fer, sous le plancher, une multitude de fiches cartonnées, de courts messages. Sur la boîte : « Fragments d’apocalypses ».
Igor, Mina, ludiques.
La belle grosse dame apprenait à Carver à être un peu plus courageux face aux infiltrés martiens. Carver, timidement, lui touche le visage.
Mina et les enfants soldats jouent dans les décombres du stade bombardé. Ils s’échangent des munitions, tirent au fusil, se font des câlins.
Les mouettes ne provoquaient qu’un petit désagrément. Les tirs de mortiers étaient vraiment plus ennuyeux que le guano, les hurlements gras.
Depuis deux heures Mina démonte un vieil obus. On essaie de l’emmener danser, au village, mais impossible de la décontenancer. Elle assure.
Carver, Mina, commencent à organiser l’évacuation de la tentaculaire mégalopole. On recrute les chauffeurs de taxi, les mimes et les hamacs.
Passer la nuit, blottis et nus, tous, sous la couette rapiécée. Conserver la chaleur, observer les ombres sur le mur. Échanger des sourires.
Sous le camion, garé devant la gare en ruine, je fixe le mécanisme explosif, le détonateur à distance, les tracts. Mes mains tremblent trop.
Déterminer la position du nord magnétique. Mettre trois pointes en acier dans une bourse en cuir de bouc. Lancer la bourse vers le nord. Nu.
La tête me tourne, je zieute alentour, hésite, la vallée ou le campement des hooligans mutants ? Les cyclopes font un excellent vin naturel.
Mina, lasse, assise dans la douche exiguë, se laisse aller à la nostalgie. L’eau, pas très chaude, déborde tranquillement. Dehors, il neige.
Deuil. Mina accélère. Le véhicule racé tangue dangereusement. Igor termine la vodka. Carver canarde les poursuivants, ivre. Enterrement ok.
La pluie ne cesse de tomber depuis maintenant 39 jours et autant de nuits. Le capitaine se branche sur la chaîne météo : et demain, soleil !
Dans le ciel, au dessus du canal fétide, de noirs cigares propagent la parole sacrée. Sur les rives, on s’essaie au jokari, nus, ivres.
Igor, Carver, enlacés, déchiffrent les indications gribouillées sur les boîtes de haricots chiliens trouvées lors de l’ouverture du tombeau.
Cinq amis se disputent la place dans la nacelle. Fin de leur amitié, début de la fusillade. Carver profite du chaos, et de la montgolfière.
Funérailles : on enterre les armes, les munitions. On repeint aussi le bunker en jaune pâle. Sur la façade Est, Mina installe les explosifs.
Collées sous la douche, tiède, les filles complotent. Le son de l’eau trouble astucieusement les micros cachés. Les orteils se touchent. Si.
Sur l’océan, lueurs d’incendies, lointaines, puis, plus tard, la grande chaleur, en attendant la vague terminale. Picoler, sortir les surfs.
Le bunker. On se repasse encore les mêmes vieux serials : « Hips, dans ta gueule mon batarang, joker de mes deux tentacules, hips. »
Une plume de grive, une brindille sèche de saule et une corde de chanvre pour les nouer ensemble. Ajouter quelques brins d’ADN. Brûler tout.
Quelques secondes après la Fin, dans le désert vitrifié, seul se tient le narrateur. Pour une fois, les mots lui manquent…
Et nos voix, lointaines, de se mêler, enfin, malgré le vent, glacé. Et une mélodie, optimiste, de retentir dans les couloirs du bunker deux.
Dans les ruines, les mêmes filles, plus tard. Des fleurs dans les cheveux, elles dansent. Les yeux pétillent, la musique est vraiment extra.
Presque plus rien à manger, de l’eau à volonté, neuf cent gélules d’extasy. Nos trois compères ne s’imaginaient pas survivre bien longtemps.
Spoiler : à la fin on va tous mourir.
L’homme à la tête de chat, au piano, aimait nous interpréter d’antiques chansons pop d’avant la guerre. Carver l’accompagnait au triangle.
Sur la table basse en bois sombre, la vieille boîte à biscuits, une centaine de petits sachets. La poudre ne va pas manquer ce soir. Mais.
Et notre héros, posté sur les hauteurs de Naples, de contempler les flammes, l’insurrection, les combats et les danses. On rase gratis. Oui.
Pour passer le temps, les tireurs observaient les manigances des soldats arméniens dans la ville basse. Trafic d’organes et poésie lyrique.
Quelques minutes avant de débuter ce nouveau projet, je me posais foule de questions métaphysiques. Dans la salle de classe : grand silence.
Dehors, la pluie radioactive, grise, épaisse. Dedans, nous, notre affection mutuelle, nos corps qui se touchent. Sourires.
Depuis la forteresse ensevelie, Mina surveillait les miliciens ivres depuis deux jours déjà. L’aube, le village désert, la neige, un renard.
Après la première, et brêve, réunion, la cellule s’est accordé sur un point, le drapeau : il sera noir. Noir ça va avec tout. Mina se marre.
Sur la plage, une cloche massive, à demie enfouie. Les restes du presbytère. Nos vélos.
Le canal gelé servait de terrain de chasse à une bande de gamins kantiens. Gare aux chats et aux souris de passage. Les chiens, ça passait.
Mina, Carver et l’homme à la tête de chat, remontent le flux incessant des réfugiés irradiés, vers le centre, vers la lumière brûlante, nus.
On déverrouille la lourde porte métallique. L’entrée est solennelle, personne ne moufte. On se débarrasse des téléphones. Sublime légèreté.
Passer la porte extérieure, entrer dans le sas, la porte se referme, puis 39 marches, une gifle, la porte intérieure s’ouvre, palace total.
Tendre les jambes, les bras, s’étirer au maximum, ronronner brièvement. Par la fenêtre, apercevoir l’aube sur les ruines. Sauter du lit, nu.
Dans les ruines, deux petites filles jouent à la guerre. Mina se fige, mimant une blessure par balle. Carver l’embrasse pour la soigner. Si.
Mina dévisage Igor, longuement, les mains dans les poches de sa combinaison de saut. Igor ouvre les écoutilles avant. Carver attrape le sel.
Mina utilisait un logiciel militaire chinois pour produire d’élégantes aquarelles de la citadelle. Carver préférait les pinceaux humides.
Nos petits jeux, innocents, ne provoquaient que morts et désolation. Mon nouveau vernis, « tumeur maligne », faisait sensation dans la région.
Sur la plage couverte d’algues mutantes mangeuses de chair, un groupe de mariachis, terrorisé, se prépare pour la grande parade du solstice.
Et dehors, dans le froid, nul espoir. Seulement la glace grise, la neige noire et les légions aveugles. Igor, à l’intérieur, calcule la fin.
Dehors, les anciens dieux foulent la terre. Par la fenêtre, les hurlements des premiers sacrifiés. Et, Carver, Mina, ivres, nus, attendent.
Mina et Igor, Le bunker, cuisiner en chantant, chasser la nostalgie qui risque de tout submerger, monter la radio. t.co/E3rnWQOLav
Les eaux du golfe de Naples étaient en permanence surveillées par l’incessant ballet des dirigeables argentins libertaires. On nage en paix.
Trois oranges, notre seul bien. Autour du bunker, les prédateurs, peu amateurs de fruits, ne manquent pas. On reporte le départ. Pourtant.
Igor fredonne le générique de Maraboud’ficelle, très doucement. Mina serre les poings. Carver verse deux larmes sur un bout d’enfance perdu.
Mina, Igor et Carver, dans le salon, observent le géant, ivre, qui repose sur le canapé, défoncé. À la radio, Electrelane. Ici, il est midi.
Et toujours, le drapeau noir.
Depuis les collines, on pouvait apercevoir la mer.
J’attends ton retour, dans ma tour purpurine, mon regard vers la plaine, nulle trace de ton sublime engin, seulement le soleil qui poudroie.
Quelques minutes avant la fin, l’ambiance est plutôt détendue, blagueuse et amicale. S’effleurer le bout des doigts. Dehors, les incendies.
La piscine vide, moussue, où grouillent crapauds, moustiques. Igor, en scaphandre, plastique blanc, contemple les champignons, dans le ciel.
Igor, en mini short, cuir naturel, se décide enfin. En ville, on ne parle que de ça. Nos troupes, enfin, au nord, hilares, se convertissent.
Pour tromper l’ennui, inévitable, nous avions décidé de ne plus nous réfugier dans les abris pendant les bombardements. Ça marche trop bien.
La cave, encore, sous l’usine au bord du canal, le béton partout, le groupe électrogène dans un coin, les punks qui s’agitent, nous enlacés.
Au début de l’été, nous mangions, en salade, de longues plantes rouges, « Artères de Jupiter », c’était raisonnablement infect, et triste.
Allongés dans l’herbe rase, brûlée, on se frôle, souriants, nos doigts lumineux s’enlacent, se crochent, nos peaux irradiées se collent.
Mina me donnait ses vieilles robes, les longues, pas pratiques pour courir. Ça me dépannait totalement pendant la, courte, saison des bals.
Mina, Igor, luddites.
Un marteau à tête ronde, six clous et un hideux crucifix en laiton, le contenu de sa besace. Ses bottes militaires rouges, un son rassurant.
La réserve : plus de piles, plus de munitions, plus d’eau, juste des boites de Lego, un gros stock, et sept mimes muets. On ferme la porte.
Mardi. On émerge de l’abri de fortune et on se rassemble dans la prairie luminescente. Cueillette et danses variées sont au programme. Nus.
Igor, Carver, enlacés. Sensation d’étouffer. Mina chantonne. La nature mutante est d’un rouge orangé. Nos amis découvrent 7 nouvelles fins.
Je colle l’oreille contre le mur, j’entends les gémissement, les murmures, les incantations. Puis viennent les démons, les sacrifices. Top !
Quelques jours après la guerre, les ruines de l’antique cité. La jungle partout. Les militaires, de tous pays, rient, baisent et pardonnent.
Les siciliens occupaient le hameau depuis 6 semaines. Vote à l’unanimité pour chaque décision importante. Duels acrobatiques pour le reste.
La cafétéria bondée, les brumes du sommeil, un thé tiède, le débat mortel du matin qui agite déjà l’abri 813 : la peste ou l’alcool de rat ?
On se retrouvait dans le hall pour comparer nos expériences. Puis, après le tirage au sort, on remontait dans nos chambres. Changer de sexe.
Mina nettoie sa carabine, astique sa lunette. Relire Solanas. Prendre de la hauteur. Tenir compte du vent, retenir sa respiration. Sourire.
La citadelle était reliée à l’île par une mince bande de terre assujettie aux marées. On utilisait ensuite un vieux monte-charge effrayant.
Rave dans les souterrains, les adolescents, les vieillards, se pressent dans le noir. Les mains se touchent, les lèvres s’effleurent. Ciel !
Sur la terrasse ensoleillée, le temps semblait passer au ralenti. En contrebas les touristes, ivres, exigeaient de rencontrer le Pape, nus.
Vaincus par l’excellente qualité, la gratuité et l’abondance de biens de consommation culturels, les révolutionnaires somnolent, abusés.
On arrive au hameau par un sinueux sentier forestier. Les petites maisons sont entassées autour d’une, choquante, impie, cahute sur pilotis.
Depuis quelques jours la Réalité s’obstinait à dépasser allègrement les limites de la fiction, coupant salement la chique du narrateur, nu.
L’agence chargée de gérer les états de catastrophe naturelle décide de fermer provisoirement ses portes aux chefs d’entreprise en fuite. Si.
Mina, Igor, Carver s’embrassent. L’homme à la tête de chat renverse sa coupe sur le mange disque. La fête est annulée. Dehors, on se bat.
Le jour de la fin de tout, la pluie n’était pas plus abondante, humide ou sale, que la veille. Les enfants riaient. Puis, la grande chaleur.
Par une fenêtre étroite de l’ancien monastère devenu hôtel de luxe, Igor contemple l’île, l’adriatique, les ruines du fort détruit. Cloches.
Dans la pénombre de la chambre numéro huit, regarder Mina dormir, mes mains tremblent, je pose le livre sur la table, je sors. C’est l’aube.
Installé sur la minuscule terrasse du café français, Carver, en transe, terminait les derniers chapitres lapidaires de son brûlot définitif.
La vie, sur terre, est sur le point de disparaitre. Mais nos amis, goguenards, ne perdent pas le sens de l’humour. La lumière, trop vive.
La 7ème compagnie de paras zaïrois nous dépasse chevauchant de lourdes motos japonaises. Le petit dernier se penche : coeur avec les doigts.