Pour quitter le bunker : pressez le bouton rouge, énorme, puis attendez la fin des explosions, puis celle de l’hiver nucléaire, puis sortez.
Trois oranges, notre seul bien. Autour du bunker, les prédateurs, peu amateurs de fruits, ne manquent pas. On reporte le départ. Pourtant.
La pluie ne cesse de tomber depuis maintenant 39 jours et autant de nuits. Le capitaine se branche sur la chaîne météo : et demain, soleil !
L’homme à la tête de chat, au piano, aimait nous interpréter d’antiques chansons pop d’avant la guerre. Carver l’accompagnait au triangle.
Dehors, la pluie radioactive, grise, épaisse. Dedans, nous, notre affection mutuelle, nos corps qui se touchent. Sourires.
Sur la crosse du fusil de Mina, 87 encoches. Carver n’a pas de fusil. Son arme : son charme. Igor, déjà saoul, confectionne des moscow mule.
Igor était particulièrement sujet au vertige, au mal de mer, aussi. La survie dans une île, sur les hauteurs d’un bunker antique : parfait !
Carver, Mina, commencent à organiser l’évacuation de la tentaculaire mégalopole. On recrute les chauffeurs de taxi, les mimes et les hamacs.
Au début de l’été, nous mangions, en salade, de longues plantes rouges, « Artères de Jupiter », c’était raisonnablement infect, et triste.
Le soleil sur ta nuque, je m’approche, le capturer, échec. L’ombre sur ta hanche, roder, bondir, sans résultat. Un tigre dans le salon, hey.
Dans le ciel, au dessus du canal fétide, de noirs cigares propagent la parole sacrée. Sur les rives, on s’essaie au jokari, nus, ivres.
Depuis les collines, on pouvait apercevoir la mer.
Et la souris de jaillir de son trou, courir follement dans la prairie, son coeur palpitant, tant de vie, d’urgence. Dans le ciel, le faucon.
Je ne doute pas que tu sois quelqu’un de raisonnable. Je ne doute pas de tes bonnes intentions. Je ne doute pas de ta réalité. Presque pas.
Allongés dans l’herbe rase, brûlée, on se frôle, souriants, nos doigts lumineux s’enlacent, se crochent, nos peaux irradiées se collent.
L’utopie anarchiste bordelaise se termine brusquement, un mardi. Quelques explosions, une épidémie soudaine, l’avènement du dictateur ivre.
Mina, Carver et l’homme à la tête de chat, remontent le flux incessant des réfugiés irradiés, vers le centre, vers la lumière brûlante, nus.
Dans les débris de la ville décapitée, une boite en acier nu. Au fond de la boîte, sous la sciure, l’espoir et un petit dragon en plastique.
La vie, sur terre, est sur le point de disparaitre. Mais nos amis, goguenards, ne perdent pas le sens de l’humour. La lumière, trop vive.
Le mystérieux salon jaune du dirigeable rebelle : Loulou et Mina, victorieuses, se partagent les restes de l’utopie bourguignonne. Au poker.
Le jour de la fin de tout, la pluie n’était pas plus abondante, humide ou sale, que la veille. Les enfants riaient. Puis, la grande chaleur.
Mina nettoie sa carabine, astique sa lunette. Relire Solanas. Prendre de la hauteur. Tenir compte du vent, retenir sa respiration. Sourire.
Juste avant l’aube, les sirènes. On commençait à s’y habituer. La bonne heure pour nourrir les félins, aveugles. Puis, un thé, vert et fumé.
Pour tromper l’ennui, inévitable, nous avions décidé de ne plus nous réfugier dans les abris pendant les bombardements. Ça marche trop bien.
Vaincus par l’excellente qualité, la gratuité et l’abondance de biens de consommation culturels, les révolutionnaires somnolent, abusés.
Et nos élites, dangereusement sobres, de décider, en grandes pompes, sur un joli papier doré, et sonnent les trompettes, de ne rien décider.
La cave, encore, sous l’usine au bord du canal, le béton partout, le groupe électrogène dans un coin, les punks qui s’agitent, nous enlacés.
On arrive au hameau par un sinueux sentier forestier. Les petites maisons sont entassées autour d’une, choquante, impie, cahute sur pilotis.
Et nos héros, fatigués, de contempler l’arrivée d’une aube timide, mais riche de promesses. Leurs doigts de s’effleurer. Fredonner, sourire.
Mina, cheveux rasés, hautes chaussures militaires, jumpsuit noire, assure le spectacle. Ses bras moulinent, hypnotiques. Igor, nu, sanglote.
La belle grosse dame apprenait à Carver à être un peu plus courageux face aux infiltrés martiens. Carver, timidement, lui touche le visage.
Sur la table, un carnet contenant toutes les réponses. Dans la salle, sept bandits vraiment malins. Et Mina, prête à tout. Pas un bruit, ok.
Passer la nuit, blottis et nus, tous, sous la couette rapiécée. Conserver la chaleur, observer les ombres sur le mur. Échanger des sourires.
Sur la table : une boite, noire. Dans la boite : cinq millions de nanomachines plutôt agressives. A la porte, les miliciens flous. J’hésite.
Sur la terrasse ensoleillée, le temps semblait passer au ralenti. En contrebas les touristes, ivres, exigeaient de rencontrer le Pape, nus.
Et notre héros, posté sur les hauteurs de Naples, de contempler les flammes, l’insurrection, les combats et les danses. On rase gratis. Oui.
Dans sa citadelle, sur la falaise inexpugnable, le vieux fou prépare sa revanche. Dans la vallée cachée, on termine de difficiles vendanges.
La citadelle était reliée à l’île par une mince bande de terre assujettie aux marées. On utilisait ensuite un vieux monte-charge effrayant.
Igor, Carver, enlacés, déchiffrent les indications gribouillées sur les boîtes de haricots chiliens trouvées lors de l’ouverture du tombeau.
Depuis la forteresse ensevelie, Mina surveillait les miliciens ivres depuis deux jours déjà. L’aube, le village désert, la neige, un renard.
Sous le camion, garé devant la gare en ruine, je fixe le mécanisme explosif, le détonateur à distance, les tracts. Mes mains tremblent trop.
Depuis quelques jours la Réalité s’obstinait à dépasser allègrement les limites de la fiction, coupant salement la chique du narrateur, nu.
Igor, Mina, ludiques.
Igor, en mini short, cuir naturel, se décide enfin. En ville, on ne parle que de ça. Nos troupes, enfin, au nord, hilares, se convertissent.
Sur la plage couverte d’algues mutantes mangeuses de chair, un groupe de mariachis, terrorisé, se prépare pour la grande parade du solstice.
Mina et les enfants soldats jouent dans les décombres du stade bombardé. Ils s’échangent des munitions, tirent au fusil, se font des câlins.
Le bunker. On se repasse encore les mêmes vieux serials : « Hips, dans ta gueule mon batarang, joker de mes deux tentacules, hips. »
Mina avait trouvé un oud en bon état dans les ruines de Strasbourg. Ses tentatives pour l’accorder correctement ne donnait pas grand chose.
Nos petits jeux, innocents, ne provoquaient que morts et désolation. Mon nouveau vernis, « tumeur maligne », faisait sensation dans la région.
Le jour de la fin du monde, l’aube était arrivée calmement, comme à son habitude. Tout était normal, partout. Puis, plus rien.
Recueillie par les prêtresses du Grand Matriarcat Sibérien Erratique, Mina se laissait bercer, son sang renouvelé, enfin. Et Igor, au bagne.
Cette nuit là, sous la fragile protection de la tente anti-radiation, dans la grande forêt de Sherwood, les joyeux compagnons se préparent.
Dehors, les anciens dieux foulent la terre. Par la fenêtre, les hurlements des premiers sacrifiés. Et, Carver, Mina, ivres, nus, attendent.
La tête me tourne, je zieute alentour, hésite, la vallée ou le campement des hooligans mutants ? Les cyclopes font un excellent vin naturel.
La 7ème compagnie de paras zaïrois nous dépasse chevauchant de lourdes motos japonaises. Le petit dernier se penche : coeur avec les doigts.
Sur la route de Damas, Igor ramasse cent cailloux blancs. Emballés dans la soie. Pour offrir. Dans le ciel, noirs, les terribles léviathans.
Les mouettes ne provoquaient qu’un petit désagrément. Les tirs de mortiers étaient vraiment plus ennuyeux que le guano, les hurlements gras.
Nous chassions autour du cratère verdoyant. Nous utilisions les arcs plutôt que les fusils, trop bruyants. Le gibier ne se montrait pas.
Rave dans les souterrains, les adolescents, les vieillards, se pressent dans le noir. Les mains se touchent, les lèvres s’effleurent. Ciel !
Quelques secondes après la Fin, dans le désert vitrifié, seul se tient le narrateur. Pour une fois, les mots lui manquent…
Collées sous la douche, tiède, les filles complotent. Le son de l’eau trouble astucieusement les micros cachés. Les orteils se touchent. Si.
La finale du cent mètres, les concurrents, étranges, se bousculent sur la ligne jaune. Le juge lève son pistolet. Frisson dans les tribunes.
Une plume de grive, une brindille sèche de saule et une corde de chanvre pour les nouer ensemble. Ajouter quelques brins d’ADN. Brûler tout.
Sur l’océan, lueurs d’incendies, lointaines, puis, plus tard, la grande chaleur, en attendant la vague terminale. Picoler, sortir les surfs.
Dans la pénombre de la chambre numéro huit, regarder Mina dormir, mes mains tremblent, je pose le livre sur la table, je sors. C’est l’aube.
L’Empire n’a jamais pris fin.
La nuit. Le feu.
Pupilles énormes, dans ce café désert, Igor rencontre, enfin, les jumelles Lee. Dans le ciel, le dirigeable sénatorial, écarlate, rôde.
J’attends ton retour, dans ma tour purpurine, mon regard vers la plaine, nulle trace de ton sublime engin, seulement le soleil qui poudroie.
Le canal gelé servait de terrain de chasse à une bande de gamins kantiens. Gare aux chats et aux souris de passage. Les chiens, ça passait.
Avant la cérémonie. Igor, serviable, bande les seins de Mina. Carver se taille la barbe avec précision. L’homme à la tête de chat ronronne.
Depuis la fenêtre de la chambre 12, à l’aide de mon monoculaire, je peux vous apercevoir en train de peindre sur la plage. L’orage arrive.
Les ruines de la cité antique, 1000 soldats inertes rêvent de pluies glacées, de cavernes accueillantes. Mina aiguise sa baïonnette. Brume.
La réserve : plus de piles, plus de munitions, plus d’eau, juste des boites de Lego, un gros stock, et sept mimes muets. On ferme la porte.
Funérailles : on enterre les armes, les munitions. On repeint aussi le bunker en jaune pâle. Sur la façade Est, Mina installe les explosifs.
On se retrouvait dans le hall pour comparer nos expériences. Puis, après le tirage au sort, on remontait dans nos chambres. Changer de sexe.
Quelques jours après la guerre, les ruines de l’antique cité. La jungle partout. Les militaires, de tous pays, rient, baisent et pardonnent.
Les 12 sous-marins nucléaires des Unités Libres Fanfarons du Larzac (ULFL) se cachaient, intelligemment, au fond de la mer. Igor s’ennuyait.
Avant la guerre, l’utopie, le chaos, l’entropie et tout le gros bordel d’après, Mina était libraire, Igor, épicier bio et Carver, une fille.
Mina, lasse, assise dans la douche exiguë, se laisse aller à la nostalgie. L’eau, pas très chaude, déborde tranquillement. Dehors, il neige.
Au bord de la piste de danse, j’hésite fébrilement. Un slow, je m’avance vers elle, et bredouille une demande inaudible : sourire, et rejet.
Retour au bunker. Sous le t-shirt, scotch noir en croix sur les tétons. Boire de l’eau. Écouter les bombardements, lointains. Tout est bien.
Dans la salle des réformateurs, on discutait âprement de l’éventuelle nudité des touristes saouls, lors de la visite pontificale. Confusion.
Mina, Igor, luddites.
Cinq amis se disputent la place dans la nacelle. Fin de leur amitié, début de la fusillade. Carver profite du chaos, et de la montgolfière.
Deuil. Mina accélère. Le véhicule racé tangue dangereusement. Igor termine la vodka. Carver canarde les poursuivants, ivre. Enterrement ok.
Presque plus rien à manger, de l’eau à volonté, neuf cent gélules d’extasy. Nos trois compères ne s’imaginaient pas survivre bien longtemps.
Sur la scène, violemment éprouvée par les bombardements, Carver et l’homme à la tête de chat s’agitent, épilepsie. Épiphanie dans le public.
Mardi. On émerge de l’abri de fortune et on se rassemble dans la prairie luminescente. Cueillette et danses variées sont au programme. Nus.
Mina, Igor et Carver, dans le salon, observent le géant, ivre, qui repose sur le canapé, défoncé. À la radio, Electrelane. Ici, il est midi.
Un marteau à tête ronde, six clous et un hideux crucifix en laiton, le contenu de sa besace. Ses bottes militaires rouges, un son rassurant.
Igor et Carver, bord de mer, polluée, métaux lourds et poissons morts. Coucher de soleil sur champignon atomique. S’enlacer pour oublier.
Et le matin, d’arriver enfin, la lumière ; et mains nouées, les chanceux, de cesser leurs méditations troglodytes, émerger, renaitre, enfin.
El próximo parabelo es bien el lago del demonio ?
Pas de mutilation aujourd’hui. C’est réconfortant. Nos tortionnaires se détendent, jouent au curling, ivres. C’est mon anniversaire.
L’agence chargée de gérer les états de catastrophe naturelle décide de fermer provisoirement ses portes aux chefs d’entreprise en fuite. Si.
Déterminer la position du nord magnétique. Mettre trois pointes en acier dans une bourse en cuir de bouc. Lancer la bourse vers le nord. Nu.
Dans le wagon : des roses, un canon. Mina préfère visiblement les canons. Par la fenêtre, ça canarde sévère. Igor compte les roses, ivre.
Igor sautille dans le salon. Ses pieds ensanglantés racontent son histoire. Il sautille. Ses mains, ses deux témoins. Et ses yeux, éteints.
La tournée se termine, Minnesota, plutôt un succès. Le groupe est dans la salle de bain. Allongé sur le lit, je compte le fric. Détonation.